J’étais de ceux que « In Rainbows » a déçu. Trop propret, trop facile, comme si une certaine convenance musicale de la part du groupe devait contrebalancer l’audace commerciale, le doigt d’honneur tendu nonchalamment aux majors et à leur modèle économique en fin de vie. Ok, c’est bien beau les idées, mais la musique dans tout ça ? De son échappée solo fortement connotée électro, Thom Yorke a imprimé beaucoup d’automatismes et d’expériences de savant fou au sein de son groupe. On ne sera donc pas étonnés de noter que ce « King Of Limbs » est à nouveau plus à rapprocher de la doublette « Kid A / Amnesiac » que de « The Bends ». A rapprocher, mais pas à comparer. De plus en plus riche et complexe, la musique de Radiohead, qu’on ne peut plus vraiment qualifier, garde tout de même un sens certain de la mélodie, et l’attrait de l’étrange, de l’inédit. A la première écoute, on ne peut pas vraiment dire qu’on adhère, mais on sait qu’on reviendra dessus, parce que c’est Radiohead, et qu’on sait qu’il y a forcément quelque chose derrière cette légère incompréhension ressentie. Et dès la deuxième écoute, on le sent mieux, ce huitième album. Doux, ambiancé, à la fois relaxant, mélancolique et inquiétant (même sur le riff entêtant de « Morning Mr Magpie », la voix de Thom sent plus la souffrance que le punch planteur), il s’impose comme une suite logique, abattant encore plus les barrières entre les genres (électro, pop, jazz, musique progressive), s’affranchissant encore un peu plus des habitudes du marché (en proposant seulement huit titres pour un peu moins de 40mn de musique). Un disque qui devra être apprivoisé, mais qui malgré tout ne tient pas forcément toutes ses promesses, jouant un peu trop sur ses formules savantes et un peu moins sur le feeling et la diversité des ambiances, se posant en monolithe sans faille et donc sans trop d’angle d’attaque. Mitigé j’étais, mitigé je reste.
Radiohead : Lotus flower