En un peu plus d’une vingtaine d’années, le révérend Marilyn Manson est passé de vilain épouvantail de l’Amérique bien-pensante à une simple constante de l’équation, revenant périodiquement foutre un peu le boxon, histoire de montrer qu’il est encore capable de faire peur, qu’il reste le taulier. Un peu comme Alice Cooper en son temps. Sauf que tout le monde s’en fout un peu ; ce qui était un enjeu vital pour la survie médiatique de sa formation est peu à peu devenu un gadget, voir une formalité. Aujourd’hui, ayant depuis un moment fait le tour de la question polémique et pas loin de se trouver dans la même position au niveau musical, Brian Warner, la quarantaine bien sonnée, est bien obligé de sortir de sa zone de confort, au moins de quelques centimètres, pour ne pas s’auto-parodier (trop tard, c’est déjà fait diront certains – oups, je m’y vois d’ailleurs). « The pale emperor » renoue donc largement avec la période musicale « Eat me, drink me ». Soit un metal alternatif sombre et mélodique, gorgé d’influences plus classiques, du rock au blues en passant par ce que l’americana a de plus fangeux. S’il reste des sonorités industrielles, elles ne sont là qu’à doses homéopathiques, presque comme un alibi. Restent donc des titres épurés, dans lesquels on pourra bien entendu retrouver tout ce que Manson a déjà pu proposer par le passé, mais arrangé de façon moins grandiloquente, plus adulte, ce qu’il reconnaît sans mal. A presque 50 berges, on comprend aisément cette évolution déjà bien entamée dans les efforts précédents, malgré quelques volte-faces. Et vu le rendu assez excellent de ce neuvième album studio, on est pas loin de penser qu’on y a gagné au change. « The pale emperor » est un très bon disque. Pas imparable, mais pas loin, il présage de lendemains radieux de noirceur, et peut-être d’un « Antichrist superstar » du 21e siècle comme 10eme album…