Je me suis retrouvé à jauger « Bruce Lee », un titre de Jewel Usain présent sur ce disque, sur Groover, sans jamais avoir lu un mot sur le rappeur d’Argenteuil. Et pour ne rien vous cacher, j’en suis resté autant mitigé qu’intéressé. Ce type a une plume, une personnalité, une gueule, et sait jouer de tout ça au travers de clips et titres malins, comme des chats de Schrödinger, à la fois dans et en dehors du rap game à la française, employant certains éléments tout en s’écartant de certains poncifs. Et ça, ça peut perdre un peu ; au final, on ne sait pas trop de quel côté de la barrière il se trouve, le bougre. Est-ce qu’on peut faire la bombe dans la soupe après avoir craché dedans ? Bah, et puis pourquoi pas ? Je suis revenu ici, à la sortie d’un premier album, parce que même si je n’accrochais pas à 100 %, si les éléments les plus trap et street me dérangeaient un peu, car trop prévisibles, déjà vus, j’ai senti un (gros) potentiel. Ce potentiel est ici largement exploité. Bien sûr, on sent que ce disque n’a pas été développé comme un tout mais comme une suite d’événements, une progression pas à pas, avec des auto-références d’un titre sur l’autre, comme au sein de la même saisons d’une série télé. Ceci dit, c’est pas désagréable du tout. Non, ce qui me gêne plus c’est le gros côté trap, avec des plans et des mélodies souvent interchangeables (« Paw patrol », « Mavado », « En plein océan »). Oh, ça ne veut pas dire que ça ne peut pas fonctionner. Mais ça reste pour moi du « filler » et je pense que Jewel Usain aurait pu faire mieux. D’ailleurs un titre comme « Mode difficile » (surtout sa première partie) le prouve bien : tout y est impeccable, de l’instru qui évoque quelques influs nippones au texte élastique. Les textes, c’est le gros point fort du monsieur. Il y a encore du travail pour les affiner, les rendre incroyables, mais ils comportent quelques moments d’anthologie. Après tout, bon, « Mode difficile » est un premier album, et ce qu’il accomplit est déjà impressionnant.
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