Si, comme beaucoup, et pas forcément à tort, vous pensez que le hardcore ou le post hardcore ne sont pas les genres les plus ouverts et élastiques qui soient, ce disque pourrait bien vous faire changer d’avis. Mais faisons tout d’abord un petit bond en arrière dans le temps (vous avez vu comme je suis souple ?), pour expliquer la genèse du projet. Nous sommes en avril 2016. Converge est venu interpréter « Jane doe » au Roadburn festival, où sont également présents Steve Von Till, Stephen Brodsky (Cave In) et Chelsea Wolfe. Ces gens de bonne compagnie s’entendent sur une tournée commune. La sauce prend, autant d’un point de vue personnel que de l’accueil du public, et une envie de retravailler ensemble se fait jour. Bien sûr, les agendas de chacun tout comme les événements font que cette collaboration a probablement mis plus de temps que prévu à voir le jour, mais la voici enfin. Et le moins que l’on puisse dire c’est qu’elle est aussi inattendue que réussie. Inattendue, parce que même si on connaît et apprécie les différents univers des artistes en présence, les voir se confronter et s’amalgamer de façon cohérente est plus complexe. Réussie, parce que chacun a pris ça très au sérieux et y a mis son âme ; dès les premières minutes, on ne peut qu’être impressionné de la profondeur et l’amplitude de la musique. Je ne vais pas vous mentir pourtant ; sur les premières secondes de « Blood moon », quand seule la voix de Jacob Bannon est posée sur un piano lugubre, je n’accroche pas. Et puis le titre prend son essor, et je me ravise. Le reste, c’est une tuerie. Du début à la fin, un ascenseur émotionnel d’une force et d’une justesse hallucinante. Concrètement, au sein de ce « Bloodmoon » premier du nom (on peut donc espérer une seconde partie au moins), se croisent post hardcore, noise, doom, black, gothique, grunge, post rock et rock symphonique. C’est dans les moments les plus collectifs, lorsque les côtés les plus hardcore de la musique s’estompent un peu, que je préfère ce groupe qui n’en est pas un. Du coup, je suis moins sensible à des titres de la trempe de « Tongues playing dead » ou « Lord of liars », plus proche de la matière première de Converge. Mais le reste pourrait facilement me filer des frissons. Bon, le souci d’un tel projet, c’est que par la suite, on risque de juger la musique de chacun à l’aune de celui-ci, et de se dire « c’est tout ? ». Mais ne nous perdons pas en conjectures et profitons de la messe noire qui nous est offerte ici !
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