
Les albums instrumentaux, à part en domaine electro, neo classique et jazz, j’ai toujours trouvé ça casse-gueule. D’abord parce que, c’est vrai, je suis très attaché à la voix, fusse-t-elle utilisée elle-même comme un instrument. La plupart du temps, je l’avoue, je me fous du texte. Je trouve que la musique est-elle même vectrice de sentiments, et la voix est, en ma qualité de non-musicien, le seul élément auquel je puisse me rattacher, m’identifier quelque peu. Vous l’aurez compris, Divide And Dissolve est un groupe instrumental. Un duo féminin multiculturel, mêlant cultures cherokee et maori, et engagé socialement et politiquement (elles veulent « décoloniser et démanteler la suprématie blanche »). Ce qui rend le choix du tout instru’ un peu plus incongru encore à mes yeux. Et pourtant, avec leur drone doom post metal progressif (bien qu’elles se refusent à tout étiquette et toutes scènes, faut bien les caser quelque part), elles ont réussi à faire tendre l’oreille à Geoff Barrow, qui les a signé sur son label Invada pour ce troisième album. Comment le message transparaît au travers des 8 titres de cet album ? Je vous laisserai en juger. On peut, par le biais de la métaphore, affirmer que le duo le martèle, va creuser au plus profond pour l’implanter dans le cortex de ses auditeurs, à coup de guitare au fuzz tronçonnant tout ce qu’il touche, de percussions sourdes et doom et de mélodies et ambiances hypnotiques qui vous plongent dans un état second. Même le spoken word « Did you have something to do with it » a quelque chose de désincarné dans sa diction. Le saxo arrive dans les moments les plus calmes et menaçants, pas si loin du dark jazz, faisant miroiter la lumière par touches blanches, comme des coups de poignard dans la nuit. L’ensemble est volontairement noisy et brouillardeux, et « Gas lit » n’est clairement pas à mettre entre toutes les oreilles. Pas inintéressant, mais pas génial non plus, ce disque a une valeur de par sa radicalité et sa manière de traiter le son, ou d’allier les sons, plus personnelle que ses voisins.