
Est-ce que le black dissonant et expérimental de Blut Aus Nord peut encore évoluer en 2022, alors qu’il exploite depuis des années le même filon ? On peut légitimement se poser la question. Parce que, si différences il y a entre deux opus depuis l’exceptionnel « The work which transforms god », elles restent assez discrètes au premier regard, à la première écoute. Pourtant, je ne vais pas vous le cacher, chaque nouvelle sortie du projet intime de Vindsval a quelque chose de fascinant à mes yeux. Est-ce dû à la structure des titres, à ces riffs qui virevoltent, aux ambiances lovecraftiennes qui se dessinent au fond ? Un peu de tout ça, je pense. Attention, je n’ai jamais dit qu’un album de Blut Aus Nord ne demandait aucun travail, ne représentait pas une avancée conceptuelle et musicale pour le compositeur. Mais celles-ci restent extrêmement subtiles et ne seront décelées que par celles et ceux qui suivent le projet depuis longtemps. J’en suis, et peux donc vous dire que ce disque porte bien son titre. Blut Aus Nord renoue avec le style de son œuvre phare, écartant les passages plus mélodiques de la dernière trilogie. Que toutefois, il y joue plus sur la répétition, sur les rythmes syncopés, et aussi qu’il y intègre d’autres choses, comme des lignes de chant plus fantômatiques et des atmosphères plus épaisses et rampantes. Certains tentent d’y apercevoir des influences jazz, musique appréciée par Vindsval depuis des années. Ce n’est pas mon cas.Le black metal est pour moi autant un concept qu’un style ; il existe au travers de l’opposition au reste, et ce reste étant en permanente évolution, le black évolue également, cqfd. Il n’a plus besoin, depuis longtemps d’ailleurs, de jouer la surenchère dans la violence, a perdu le combat de la vélocité et la technicité en faveur du death prog, et a tout donné en matière d’imagerie evil. Il ne peut donc que bouger le curseur vers moins de lisibilité, un flou qui laisse deviner mais ne montre pas, un genre aussi repoussant que subtil. « Disharmonium » est donc une suite logique, en toute cohérence avec le reste de la carrière de Blut Aus Nord.






