Quand tu tombes là-dessus, tu peux te demander : « est-ce que je fais le vieux con ou pas ? ». Allez, je m’assume, je le fais. Bah ça, là, San-Nom, c’est du rap. Y’a de la création, de la personnalité, une recherche de son, un flow, et du texte. Et putain, ça fait du bien, parce qu’à force de se faire rare, le hip-hop a quasiment disparu du paysage actuel. Alors oui, San-Nom chante aussi (surtout ?), et on est pas loin du « Mc qui chante bien mais c’est pas c’qu’on d’mande » de je ne sais plus qui dans les nineties. Dites que son style est moderne, hybride, dites ce que vous voulez en fait, mais quand le mec rappe, il le fait vraiment. Pas d’effets à la con, pas de rimes pauvres, et on évite les chausses-trap. Le flow est hybride, personnel, le timbre de San-Nom est celui d’un petit merdeux, celui qui, du haut de ses vingt piges a déjà tout pigé. Et puis quoi ? C’est pas ça la rébellion ? C’est pas comme ça qu’on aimait nos rappeurs et nos punks quand les genres ont explosé ? Mais l’époque y a ajouté sa marque ; aujourd’hui, les gars assument leur complexité, les caractères ne sont pas aussi marqués, on est tout et son contraire à la fois. Et ça, San-Nom le personnifie à merveille. Il n’est pas tout le temps dur, il n’est pas tout le temps sérieux, il n’est pas tout le temps décalé. Parfois même, on peut trouver des titres traitant franchement de sentiments et situations taboues il n’y a pas si longtemps dans le genre : amour, solitude, doute… Alors même si ce ne sont pas mes préférés, je salue la performance et le courage. Ce qui est sûr, c’est que San-Nom ne se fera pas que des potes avec ce disque. Trop personnel, trop cynique, trop le cul entre deux chaises, trop bavard, trop branché chanson… ça fait beaucoup pour un skeud qui s’appelle « Silence », non ? C’est sûr. Et encore, le monsieur avoue qu’il avait le double de texte quasiment pour chaque titre. Et qu’il a en fait écrit encore plus, puisqu’il a jeté l’équivalent d’un album avant ça, trop axé dérision apparemment, alors qu’il avait envie d’être plus sérieux. Oui, « Silence » est plus sérieux que ce que j’ai pu entendre de San-Nom après coup, mais il ne l’est jamais à 100%. Complexe, compliqué et décomplexé, un pied dedans et la face dehors pour mieux respirer, voilà un gars à suivre !
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