
Il y a peu, le toulousain Melan passait le cap de la trentaine. Une étape qui fait réfléchir, qui rapproche de l’inéluctable, et qui s’avère une très bonne raison de faire un bilan en forme d’album. Mais ça n’était pas suffisant. Et c’est tant mieux, parce que si j’avais raté « La trentaine », je suis sur les rails pour cette version revue et augmentée. Melan a vieillit, il est devenu père (il en parle beaucoup dans ses textes ici), il ne voit plus les choses comme il les voyait il y a quinze ans lorsqu’il a commencé à rapper. Bien sûr, il continue à se révolter, à dénoncer, à se situer dans et hors de la société à la fois ; après tout, c’est là la vraie place des artistes. Mais il ouvre aussi de plus en plus les yeux sur le monde qui l’entoure, sur la scène à laquelle il appartient, et porte un regard critique sur son passé, sur ce qu’il a fait et vécu, peut-être même sur ce qu’il pensait. Bon, on va crever l’abcès. Une heure trente, 30 titres, pour un album de rap, c’est très long. Plusieurs ont essayé, et plusieurs ont échoué. Là où Melan est malin, c’est que parmi les nouveaux titres, il y a pas mal de titres très forts, qui à la fois changent totalement d’ambiance, mais aussi donnent lieu à des featurings historiques. On pourra bien sûr citer « Vas-y filme ! » avec Furax Barbarossa, « 5% » avec Swift Guad, « Discrets » avec L’Uzine. On retrouve en tout cas les sonorités plutôt old school et mélancoliques qui parleront à ceux qui n’ont pas passé le cap du drill et de la trap. Ce qui est plutôt mon cas, donc je ne lui en veut pas vraiment. Mais y’a pas, ça reste long, et pour ma part je n’arrive pas à enquiller tout ça sans broncher, même si comme dit plus haut, il y a pas mal de bons titres ici : « Si conscience n’entend pas », « La trentaine », « Papa n’aime plus maman », « J’vous B », « Je ferai de mon mieux »… Je suis plus circonspect sur les plages où Melan (ou d’autres) chantent ; pas mon style. Globalement, l’album augmenté est plutôt bon, mais je le trouve tout de même un peu inégal ; il reste un peu trop ouvert à autre chose, et les textes aussi, je trouve, marquent un certain doute concernant l’angle d’attaque à adopter. C’est purement subjectif, et je reste convaincu de la valeur du bonhomme et de son art, mais il fallait que je le dise.