Je ne connais Yuck que de nom, et n’ai jamais écouté Cajun Dance Party. Je suis donc assez mal placé pour vous parler du passé musical de Daniel Blumberg. Mais est-il besoin de le connaître pour profiter de ce premier album solo et en déceler toute les richesses ? Certainement pas. Car quand « Minus », premier des sept titres de ce disque débute, on est transpercé pas sa beauté et sa mélancolie. Piano, voix, cordes ; il n’en faut pas plus pour emporter l’auditeur dans ses filets. « Fuse » n’a qu’à enfoncer le clou, ajoutant une guitare électrique grungy (Dinosaur Jr n’est pas loin) au tout. Avec tout ça, on a pas vu arriver « Madder » et ses neuf minutes de développement chaotique pour « juste » 3 minutes de vraie chanson au milieu. Pas évident à cerner ni à accepter, un tel engin. Et une vraie prise de risque pour l’artiste, qui nous dit ici : « attention si vous pensiez m’avoir cerné, tout peut encore arriver à chaque moment ! ». Heureusement, « Stacked » revient à une ambiance plus pacifiée, avec toujours cette guitare équilibriste, et une voix qui va cette fois plus s’aventurer dans les aigus. « Permanent » suit le même chemin fait de beauté, de légères dissonances, de gravité et de baroque attitude. Suit une « The bomb » bien moins incendiaire et toujours aussi magnifique. « Used to be older », dernier chapitre de ce beau moment, se démarque par son choeur répétant à l’envi son titre, alors que la pop song toujours aussi empreinte de joliesse progresse vers des cieux plus cléments et un final lumineux, quelque peu zébré par des éclairs dissonants, tentant sans y parvenir d’en saboter la solennité et la paix. Bref, un album superbe, hanté de la plus belle des manières par une récente rupture (ça donne de la matière) mais aussi par quelques habitudes deconstructivistes qui certes lui donnent de la personnalité mais en sapent également les effets.
Daniel Blumberg : Minus