
Neuvième album solo pour Kery James, qui s’approche dangereusement de la cinquantaine. « J’fais du rap hardcore sur violent breakbeat », qu’il dit. Et vous savez quoi ? Il a raison. Lui qui a toujours considéré le rap comme une arme et a juste changé sa façon de l’utiliser après la période Ideal J n’a jamais baissé en intensité. Il le revendique, et a toujours fait suivre ses propos d’actes. Pour autant, il ne se voile pas la face ; son parcours a été semé d’embûches, et pour partie c’est lui qui en a planté les graines. Alors oui, c’est certain, il a depuis quelques années, ça lui est souvent reproché, un côté très moralisateur, mais pour moi ça reste vraiment l’un des modèles du hip-hop français. La question est ; à qui s’adresse-t-il aujourd’hui, ou plutôt à qui devrait-il s’adresser ? Kéry a un public captif, celui qui le suit et l’apprécie depuis des années, mais son style, son flow, son refus de céder à l’écriture et le son qu’écoutent les jeunes générations l’éloignent d’elles. C’est pourtant ça que nous, les b-darons (bah oui, on est plus trop des b-boys les gars, faut pas se leurrer) on aimerait que nos minots écoutent. Parce que même si on peut être en désaccord avec quelques textes ou passages de « R.A.P. », même si on le trouve que parfois il grossit un peu trop le trait, ça reste une œuvre vraie au sein de laquelle il s’ouvre un peu plus à son public, continue le chemin vers la compréhension et l’acceptation de lui-même qu’il a commencé à arpenter il y a longtemps. Ce qui est notable ici, c’est une ouverture encore plus grande au niveau son ; le disque est bourré d’influences world music en tout genre, et comporte pas mal de featurings qui modifient totalement le feeling : on trouve Zaho (oui, oui) sur « Demain », Wally S. Beck sur « La France », Camille Lelouch sur « Avec des si…. », Fally Ipoupa sur « 1 pour le savoir », Boulaye BLS sur « Rien n’a changé », Kareen Guiock-Thuram sur « Qui on est ? ». Sur « La froideur de décembre », j’ai l’impression d’entendre un Scylla sur le refrain, mais apparemment non ; en tout cas la couleur musicale est là. Bref, un nouvel album qui va chercher la diversité des thèmes musicaux et embrasser un peu plus le monde qui l’entoure, avec toutefois toujours la même langue acérée ; Kéry n’est pas là pour raser les murs ni se faire des potes. Et on l’apprécie pour ça !






