
Nerlov, c’est un personnage. Un gars qui a une conscience aiguë de lui-même, de ses faiblesses, de son état d’être humain moyen… et qui en joue. Sa voix est bizarre ? Bah il la met en avant. Il n’est pas toujours inspiré ? Il assume. Bien malin celle ou celui qui saura dire si c’est de la fausse modestie, de l’humour ou du cynisme ; en vrai, on se situe quelque part entre les trois. La première fois que je l’ai entendu, c’était sur une reprise de Gainsbourg il y a quelques années. Pas convaincu. Parce que je ne suis déjà pas fan de l’original, parce que je n’arrive pas à capter ce qu’il y a derrière, parce que pour apprécier ça, je pense qu’il faut déjà apprécier le bonhomme derrière. Et puis il y a quelques semaines, « C’est raté » arrive dans mon Groover. Je m’y sens toujours un peu mal à l’aise (le timbre est vraiment très particulier), mais je capte bien plus la personnalité. Et cette mélodie electro chargée de tension me plaît. Est-ce que ce nouvel album va dans le même sens ? Oui et non. On retrouve en fil rouge cet amour de l’electro, cette voix « rien à foutre », et ces textes inclassables, absurdes, très dans l’air du temps finalement, collant parfaitement à notre époque, à la course à rien qu’on vit au quotidien. Les titres ont quelque chose de neurasthénique, Nerlov se pose en spectateur de sa vie, la regardant avec détachement, une pointe d’amertume dans la voix. Je ne sais pas si j’aime bien ce qu’il fait ; ça ne me correspond pas vraiment musicalement, mais j’adore le personnage, et j’apprécie le fait que le package soit complet, que Nerlov soit un tout, musique, texte, look ; chaque chose n’appartient qu’à lui. Et puis des trucs comme « Plus lent », « Et toi », « Quel dommage » ou « Affamé » (et bien sûr « C’est raté ») parviennent à me faire dire que je ne suis pas là que pour l’artiste, mais aussi pour l’oeuvre. Nerlov, donc, c’est une rencontre qu’on oublie pas, un gars qui dit pas tout à fait la même chose que les autres, et pas tout à fait de la même façon ; c’est ça qui change tout.