N’importe quel artiste qui va sortir coup sur coup à quelques mois d’écart deux disques distincts me paraît suspect. J’avais découvert le rappeur italien Mezzosangue avec son précédent et quatrième album « Musica cicatrene » que je vous recommande vivement. Ce que je remarque tout de suite ici, c’est une sorte de transmission de pensée entre certains artistes rap : c’est au moins le troisième titre intitulée « Idiocracy » / « Idiocracie » que je découvre en territoire rap cette année. Oui, c’est dans l’air du temps, et personne ne peut plus le nier ; le monde devient de plus en plus con. Mais la connerie n’a pas sa place ici, heureusement. Si Mezzosangue a mis beaucoup plus de couleur et de groove sur ce nouvel opus, mais son verbe et son flow sont eux, intacts. Toutefois, il faut bien reconnaître que si on cherche un peu plus d’accroche, on la trouvera avec moins de mal ici. En atteste déjà le sample très soul du morceau-titre. Bien sûr, le phrasé et les textes sont toujours aussi acérés, et pourraient très bien être posés sur quelque chose de bien plus dark (j’aimerais d’ailleurs bien découvrir ce que ça donne). « Idiocracy » emploie également un gimmick et un refrain bien carton, mais traduisez les paroles, et vous verrez que c’est loin d’être inoffensif. Sur cet album, le mc a vraiment lâché un peu de lest, et on y trouvera d’ailleurs pas mal d’invités. Des invités qu’on ne connaît pas forcément de ce côté de la frontière, mais qui ne viennent pas ternir l’ensemble, même si pour certains, je les trouve en-deça du niveau de Mezzosangue. Alors oui, je préfère tout de même le disque précédent, plus sombre et brutal, mais celui-ci ne donne pas non plus la sensation d’avoir été composé sous les cocotiers une piña colada à la main ; Mezzosangue reste le chroniqueur acerbe de son époque, et ses rimes n’épargnent personne, y compris lui-même. Solide.
