Medine. Le havrais porte haut les couleurs de sa ville depuis des années, et ce nouvel album lui rend encore une fois hommage. Subtil mélange entre egotrip et rap engagé, « Medine France » montre encore une fois toute la richesse et l’ambivalence de l’univers du monsieur. C’est que Médine ne veut pas être enfermé ni dans un qualificatif ni dans un autre, et fait donc, consciemment ou pas (mais je pencherais plutôt pour la première solution) pour brouiller les pistes. Ainsi, on trouve ici autant de titres qui dévoilent encore un peu plus sur son histoire et sa vie que d’autres plus centrés sur l’attaque frontale des travers de notre société, ou d’autres encore qui n’ont semble-t-il d’autre but que d’exposer des punchlines percutantes. Mais on le sait, chez Médine le diable est dans les détails, et c’est en décortiquant les textes qu’on trouvera des sens cachés, des références plus subtiles… Mais c’est un travail personnel ; chaque album est un peu bâti à la manière d’un ouvrage ésotérique, qui ne révèle aux yeux (aux oreilles, pour le coup) des novices qu’une partie de son contenu, mais recèle bien d’autres secrets pour les initiés. Ceci dit, que vous soyez l’un ou l’autre, vous trouverez forcément, pour peu que vous aimiez le rap, quelque chose à vous mettre sous la dent. Le rap, Médine, il l’aime profondément. Le style coule dans ses veines, tatoue son âme. Ceci dit, qui aime bien châtie bien, et Médine ne se prive pas, une fois de plus, de placer de généreuses savates au rap, aux rappeurs, aux cultistes de tout poil. Et un peu à lui-même, par ricochet, par flashback interposé. « Médine France », c’est aussi un disque de bilan, de nostalgie ; l’art du havrais s’accompagne toujours de prise de recul, comme s’il vivait dans le miroir en permanence, guettant ses propres failles pour les montrer du doigt dans un premier temps, puis les colmater et en faire des forces. Ce centrage sur lui-même explique, bien sûr, l’absence de featuring sur cet album ; ce sont les fantômes de son passé qui font office de sidekick. L’artiste prouve bien qu’il n’a pas besoin de ce genre d’artifice pour briller ; les titres qu’on trouve ici sont d’une force et d’un pouvoir d’évocation tels qu’ils se suffisent à eux-mêmes. Alors oui, à part quelques coups d’éclat, je trouve cet opus moins clinquant, moins éclatant. Mais pas moins puissant, au contraire ; quand il se la jouent intimistes, les mots de Médine ont encore plus de portée et retentissent plus longtemps. Grand Médine.
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