
Depuis quelques années, certains musiciens de metal se sont affranchis de toute barrière stylistique ; les frontières entre les différents sous-genres du metal extrême, du metal tout court, et de la musique en général sont devenues de plus en plus perméables, à l’image d’une partie de notre société (celle que je préfère) qui prône la tolérance et l’acceptation des différences. Bon, bien sûr, il a fallu mettre des mots là-dessus aussi, alors on dira que Bipolar Architecture fait du post metal ; ça dit tout et rien, et ça laisse ouvertes des portes pour le futur. Concrètement, la base de la musique est assez death metal, mais parfois, dans les riffs, on trouve des influences plus black, et les structures sont inspirées du post rock et du post hardcore. Les titres de ce deuxième album sont donc plutôt étirés, même s’ils conservent une durée raisonnable (6 minutes en moyenne). Ils prennent généralement le temps de créer une ambiance avant de lâcher les décibels, et c’est là, dans ce déluge de ressentiment et de désespoir, que leurs titres prennent tout leur sens. On pourra leur reprocher de ne pas s’aventurer aussi loin que certains de leurs collègues ; effectivement, on a déjà l’impression de connaître les thèmes musicaux et de redécouvrir les émotions ressenties plutôt que de les expérimenter pour la première fois. Mais Bipolar Architecture a élevé tout ça au rang d’art, et il va être difficile d’y trouver une faille. Si le premier album du groupe s’appelait « Depressionland », ce n’est pas un hasard : le groupe turc / allemand apprécie les sensations fortes certes, mais les atmosphères sombres surtout. « Metaphysicize » suit le disque de 2022 de près, avec quelques corrections au niveau de l’équilibre des forces ; ici les éléments purement mélodiques sont bien mieux intégrés, et globalement le combo parvient à doser plus efficacement ses effets, à maximiser l’impact de ses passages féroces. On sent aussi que les titres de cet album vont aussi mieux fonctionner en live, étant plus francs dans leurs attaques. Une continuité qui fait plaisir à entendre et qui confirme le bien qu’on pensait du groupe.