Oh, oui. Je sais. On vous l’a déjà fait, le coup du disque extrême, ultime, de l’expérience, du monstre de foire, de celui à ne pas mettre entre toutes les oreilles. Alors que puis-je vous amener aujourd’hui de plus repoussant ? Eh bien mes amis, je triche. « Sore » ne sera plus jamais l’album du moment, pour la simple et bonne raison qu’il a vu le jour en 1994. Mais plus de 20 ans après, il affiche une personnalité toujours aussi unique et marquante. Buzzov.En est typique de ce qu’on peut qualifier de « groupe de malade ». Et croyez-moi, ce n’est pas la rhino-pharyngite. Contemporain de formations rigolotes comme Eyehategod ou Acid Bath, le groupe fut parmi les pionniers de ce qu’on a appelé le sludge. Genre qui n’a ici rien à voir avec les œuvres sympathiques mais somme toute assez proprettes de Baroness et consorts. Sale, bruyant, violent, malsain, « Sore » fait mal et peur à la fois. Des guitares lourdes et noisy, une basse ronde qui amène un groove inattendu en ces lieux, une batterie marteau-pilon et un chant écorché et possédé entre black et indus, voilà ce qui constitue le squelette des titres. Le rythme oscille entre doom et thrashcore uptempo, et toute trace de mélodie y est purement fortuite. Pourtant, le disque exerce une espèce de fascination sur son auditeur impuissant, possède une aura lovecraftienne, sorte d’horreur des abysses, de monolithe maléfique aux contours troublés de soubresauts organiques. Vous qui entrez, abandonnez tout espoir !